Mélissa Fries
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Proche de Georg Bazelitz, qui lors d’un entretien, affirme ne pas pouvoir s’imaginer que l’on puisse faire des tableaux «…sans déverser son âme sur la toile, sans se déculotter, sans verser de larmes et sans montrer le poing… » (Bazelitz, de Benedikt Taschen), j’aimerais arriver à un dessin qui, sans être journalistique, reste à l’écoute des convulsions du réel. L’insertion d’images de presse, le collage d’éléments photographiques m’aident à ne pas me détacher du concret, des rues, du tumulte, de la frustration et de la rage qui gronde à tous les faubourgs. Que le dessin devienne un cyclone, une tempête irascible qui brise, coupe, déracine, mais mélange malgré tout. Que le métissage se fasse malgré les barrières et les barbelés apposés par les dominants. Il y a ici la volonté de créer des images où la continuité de l’être, le lien entre les choses, invisible à nos yeux, apparaitrait. Un double enjeu se présente, à la fois métaphysique et politique car cette vision unifiée de l’être revient à contredire l’idéologie dominante de notre époque, à savoir le néolibéralisme qui individualise toujours plus les rapports. Il s’agit d’arriver à faire du « ensemble », du « tout » avec ce (et ceux) qui nous semble(nt) brisé(s), d’arriver à poser les bases d’une figuration ancrée dans le corps du monde, dans sa plus profonde immanence.
L’espace est souvent chargé, l’atmosphère sombre, les corps lourds et pesants. Ces derniers s’animent par leurs contorsions, leurs crispations, leurs danses macabres. Puisés dans le quotidien, l’actualité et l’histoire, les sujets conjuguent violence et angoisse, décantés dans des couleurs vénéneuses et un noir de charbon. Viennent se mêler observations et fantasmes, dans un monde où l’aspect décoratif est comme le miel permettant de faire passer l’amertume de l’absinthe. Cet univers allégorique est à la croisée d’horizons divers : des gravures de Schongauer à l’esthétique punk en passant par le surréalisme, l’expressionnisme allemand et les artistes de la figuration libre.
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